Dans la jungle des formations logistiques
| par Patrick Capelli

Pas facile de s'y retrouver en matière de formation logistique. D'après Maurice Bernadet, secrétaire général de l'AFITL, « l'offre est abondante mais dispersée et les intitulés des programmes pas forcément pertinents » . Cet enseignant spécialiste du transport a réalisé un recensement « aussi exhaustif que possible » des formations logistiques classées selon le niveau de sortie, l'intitulé du diplôme et la région afin de les mettre en ligne sur le site de l'AFT-Iftim.
Premier écueil : quels critères de sélection retenir ? Certaines formations utilisent le terme « logistique », mais délivre en réalité des enseignements portant sur le commerce international, les achats ou encore la grande distribution.
Deuxième problème : la mauvaise qualité de l'information donnée par les établissements sur leur cursus. Sites Web absents ou confus, informations périmées, présentation « publicitaire » des formations : le travail de clarification à accomplir est conséquent.
Néanmoins, Maurice Bernadet a pu établir un recensement quasi complet des formations logistiques disponibles en France. Parmi ces 345 cursus, 133 concernent des bac + 2, 69 des bac + 3, 35 des bac + 4, 87 des bac + 5 et 21 des bac + 6. La moyenne des groupes est de trente étudiants, sauf en IUT où ce chiffre peut atteindre la centaine.
La plupart des formations à bac + 2 sont des BTS et des DUT plutôt orientés transport, avec seulement une dizaine de cours à dominante logistique. Les formations bac + 3 sont principalement des licences professionnelles et des diplômes homologués par le Ministère du Travail. Les cours orientés logistique représentent 55 % des formations bac + 3. Les formations bac + 4 sont les moins nombreuses.
Les étudiants multiplient les formations
Majoritairement orientées logistique, elles sont délivrées par des organismes comme l'AFT-Iftim ou Promotrans, des écoles consulaires et privées ou encore le CNAM. Les diplômes de niveau bac + 5 sont plus nombreux et plus variés. On trouve ainsi des masters à orientation recherche, des masters à orientation professionnelle, des formations conduisant à des diplômes d'ingénieur, etc.
Les disciplines dominantes à ce niveau sont l'économie et la gestion, mais aussi la géographie et le juridique. Certains enseignements sont délivrés en anglais. Les formations bac + 6 conduisent toutes à des masters spécialisés reconnus par la conférence des grandes écoles (écoles d'ingénieurs ou de commerce).
Conclusion de Maurice Bernadet : le nombre des formations logistiques a considérablement augmenté ces vingt dernières années, notamment les DUT dans les années 90, les bac + 5 à partir de 1995 et les bac + 3 depuis 2000. Mais le nombre d'enseignants spécialisés dans ce domaine n'a lui pas vraiment évolué...
Autre enseignement de cette étude informelle : les étudiants multiplient les formations, enchaînant un IUT, une licence professionnelle, un master. Résultat : « il est très difficile de les convaincre de prendre un emploi et de revenir en formation quelques années plus tard, au titre de la formation continue » selon le secrétaire général de l'AFTIL.
L'état des lieux réalisé sur les formations logistiques montre un paysage opaque, des intitulés peu clairs voire trompeurs. Bref, comme le dit Maurice Bernadet, « on se demande comment les étudiants (et les employeurs...) peuvent faire un choix raisonné » . Notre prochain dossier sur la formation dans notre numéro de rentrée tentera donc de voir plus clair dans ce maquis...
Présents à ce colloque, Raphaëlle Langaigne, responsable du recrutement approvisionnement et logistique chez Auchan, et Jean-Louis Vincent, directeur des ressources humaines de Geodis, ont apporté leur point de vue de professionnel sur ce sujet des formations logistiques. La première gère 3 800 logisticiens et recherche avant tout des candidats opérationnels pour devenir responsables d'exploitation (bac + 2) puis responsables d'activité (bac + 5). « Il leur faut acquérir une autorité de compétence. C'est pourquoi la nature des stages effectués est importante » précise Raphaëlle Langaigne. Quant à son collègue de Geodis, il veut faire passer le message suivant aux enseignants : « impliquez-nous dans vos jurys d'examens, accentuons les échanges entre opérateurs et formateurs, sinon nous mettrons en place des formations maison » . Conclusion commune de ces deux professionnels : il faut rapprocher l'entreprise des études en matière de logistique.